« Il est des mythes qui ont la vie facile… Fondé sur une incertitude textuelle, porté par une crainte ancestrale, relayé par une doctrine partisane, tel est le cas du mythe du numerus clausus des droits réels, qui a pu aisément se développer en droit français et s’ancrer dans la mémoire collective, au point de devenir une espèce de principe rampant, sans véritable entrave durant des décennies.
Le droit, pourtant, ne paraît pas propice aux mythes ; bien au contraire, sa rationalité, ses fondements principalement textuels ou jurisprudentiels - du moins pour ce qui concerne le droit positif -, semblent pouvoir exclure de son domaine l’affabulation. On peut certes concevoir que l’allégorie puisse parfois être associée au droit, sous une forme imagée, ou encore que la règle puisse être exprimée sous une forme idéalisée, tel le « bon père de famille », prudent, diligent, raisonnable, mais le mythe pris dans le sens d’une « pure construction de l’esprit », qui renvoie à quelque chose « qui n’existe pas », paraît heurter frontalement le système juridique en tant que tel : le droit ne régit pas ce qui n’existe pas et ne laisse pas prise à la légende, au risque sinon d’une déstabilisation du système lui-même, ou d’une contrainte illégitime. »
Tiré de l’introduction (appels de notes omis)
[L]a théorie même du patrimoine […] apparait aujourd’hui incertaine. Certaines solutions traduisent un renforcement des aspects subjectifs du patrimoine. Ainsi avec la multiplication des biens insaisissables entre les mains des personnes physiques. A l’inverse, d’autres solutions correspondent à une montée de la conception objective du patrimoine. C’est le cas de la multiplication des patrimoines d’affectation.
Faut-il en conclure qu’une théorie du patrimoine est désormais impossible ? Qu’il est impossible de concilier la conception subjective et la conception objective ? En réalité, si l’on veut bien se souvenir qu’une théorie générale ne consiste pas à réduire à l’unité l’explication d’un phénomène mais à rendre compte dans une explication d’ensemble de la diversité de ses manifestations, c’est l’idée d’une conception uniforme du patrimoine qui doit être dépassée.